Suite aux intempéries de ces dernières semaines qui ont fait plusieurs morts, la question de la sécurité et de l’entretien des ponts, en particulier submersibles, ressurgit !
Pourtant, depuis le rapport du Sénat en 2022, sur la sécurité des ponts, qui faisait lui-même suite à une mission d’information de 2019, la mise en place des recommandations tarde et les actions ne sont pas à la hauteur des enjeux.
Entre 30 000 et 35 000 ponts sont aujourd’hui en mauvais état contre environ 25 000 en 2019. 10 % et 23 % des ponts entretenus respectivement par les départements et les communes et intercommunalités sont qualifiés de dégradés en 2022.
L’État a doté les collectivités territoriales de 40 millions sur 3 ans au titre du Programme National Ponts (PNP), ce qui reste largement insuffisant pour permettre une prise en charge adaptée : le retard se chiffre à 350 millions d’euros par rapport aux objectifs fixés par le Sénat en 2019.
Concernant la réhabilitation des ponts routiers des collectivités, il n’y a toujours pas d’aides financières. Aujourd’hui, seulement 33 % des communes bénéficient de l’expertise de bureaux d’études et de 150 agents du CEREMA dans le cadre du PNP.
L’application d’un schéma départemental d’identification des ponts routiers tel que préconisé par la mission d’information du Sénat, n’est toujours pas mise en œuvre ; Pas plus que la concertation sur la prise en compte de l’amortissement des ponts dans les outils de comptabilité publique.
Des mesures, telles que le référencement des ponts dans un SIG (seulement 30%) sont encore mal mises en place. D’autres, comme le SIG unique ne sont toujours pas créées. La moitié seulement des ponts ont un « carnet de santé ».
Dans un contexte d’aggravation des comptes publics, l’État ne peut pas ignorer indéfiniment un problème aussi urgent que l’entretien des ponts. Les collectivités territoriales sont dans l’incapacité de le supporter seules, faute de moyens financiers suffisants.
Des améliorations mais un pacte de confiance Communes – État toujours pas renoué…
En effet, malgré un affichage de « rattrapage » des dispositifs fiscaux pour les territoires ruraux, la loi de finances pour 2024 ne répond pas à toutes leurs attentes.
Au-delà des quelques avancées sur la revalorisation de la DETR, de la DSR, de la dotation biodiversité, la prolongation des ZRR en FRR, il faut noter l’absence d’évolutions sur la répartition de l’IFER et sur le rééquilibrage des dotations entre ruraux et urbains.
La nouvelle dotation pour « Amenités rurales » est élargie à l’ensemble des communes rurales dont une partie du territoire est couverte par une aire protégée. Son montant passe de 41,6 M€ en 2023 à 100 M€ et elle prendra davantage en compte la surface que le nombre d’habitants.
Les ZRR font place à France Ruralité Revalorisation (FRR) avec désormais 2 catégories, FRR et FFRR +, la doctrine d’état privilégie malheureusement les EPCI sur les communes.
L’augmentation de la DPEL bénéfice aux plus petites communes : revalorisée de 15 M €, la dotation est désormais systématiquement versée à toutes les communes de moins de 1000 habitants, sans conditions. 3000 communes en bénéficieront.
La dotation de solidarité rurale (DSR) pour 1, 9Mds € est toujours bien inférieure à la dotation de solidarité urbaine (DSU) de 2,5Mds €.
La DGF en hausse dans l’attente d’une réforme : elle atteindra 27,24 Mds € du fait d’une augmentation de 320 M€ en 2024. Mais la base forfaitaire demeurant inchangée, les évolutions ne font que répercuter une répartition inégalitaire.
Un PTZ prorogé mais limité : reconduit jusqu’au 31.12.2027, le PTZ ne concerne désormais plus que les achats d’appartements neufs en zone tendue, ou de logements anciens avec travaux en zone détendue.29 millions de foyers fiscaux ont désormais accès à cette aide.
Le Fonds vert est conforté : il passe à 2,5Mds € dont 50 M€ pour les opérations de rénovations énergétiques ou de restauration.
Reste que les élus locaux sont désormais désemparés face à une fiscalité devenue incompréhensible. Absence de transparence, sentiment d’injustice et même d’insécurité financière du fait de dispositifs imprécis, dont les délais et les conditions d’éligibilité demeurent opaques.
Si à première vue les objectifs du Plan France Très Haut Débit semblent pouvoir être atteints, la généralisation de l’accès à la fibre optique d’ici 2025 rencontre encore des obstacles.
Premièrement, le ralentissement des déploiements dans les zones les plus denses et dans les zones d’appel à manifestation d’intérêt d’investissement se confirme. Les engagements pris par les opérateurs de télécommunications ne sont pas toujours respectés, en témoigne la récente sanction de 26 millions d’euros prononcée par l’Arcep à l’encontre d’Orange.
Deuxièmement, nous confondons vitesse et précipitation, au détriment d’un déploiement durable et de qualité de nos réseaux. Pour des raisons économiques, l’aérien est privilégié à l’enfouissement terrestre, accentuant la vulnérabilité des réseaux aux aléas climatiques, comme on a encore pu s’en rendre compte lors des récentes tempêtes qui ont éprouvé notre pays. A noter que les réseaux de télécommunications ne bénéficient pas d’un raccordement prioritaire au réseau de transport d’électricité en cas de coupure.
Troisièmement, de fortes inégalités de déploiement persistent encore d’un département à l’autre.
Enfin, les objectifs ne seront pas atteints tant que la question du financement des raccordements complexes, sur les domaines public et privé, ne sera pas réglée. L’appel à projets de l’Agence nationale pour la cohésion des territoires s’est clos avec 41 demandes de financement, mais la consommation de l’enveloppe de 150 millions d’euros qui avait été mobilisée sur deux ans reste inconnue. Cette enveloppe n’est même pas reconduite et aucune proposition opérationnelle n’est présentée par le Gouvernement pour réaliser ces raccordements en 2024 !
Dernier point de vigilance, le financement des 3600 conseillers numériques dans les Maisons France Services : ce dispositif de lutte contre l’illectronisme est aujourd’hui une source de préoccupation majeure pour les élus locaux, inquiets de devoir porter l’intégralité de la charge financière de ces postes.
Le Sénat suivra avec attention la consommation de l’enveloppe de 250 millions d’euros mobilisée dans le cadre du plan de relance et nous nous assurerons d’un financement adéquat après 2025. Les objectifs de numérisation des services publics ne sauraient se faire en laissant de côté les publics les plus vulnérables et les plus isolés.
Après les attaques meurtrières du Hamas sur le territoire israélien, qui ont fait plus de 1400 morts, nous sommes tous profondément choqués par ce déferlement de violence aveugle et barbare.
Parmi les victimes innocentes, nous déplorons 30 compatriotes tués et toujours 9 Français portés disparus. La libération des otages est aujourd’hui une priorité.
Face au conflit qui s’intensifie et risque à tout moment de s’internationaliser, la France doit clairement plaider pour la paix et le respect des droits des peuples, israéliens comme Gazaouis.
Avec les exactions du 7 octobre dernier en Israël, le Hamas s’inscrit dans la lignée des opérations barbares des organisations terroristes islamistes. Il a enchainé massacres de masse, actes de torture d’une cruauté bestiale et enlèvements de plus de 200 civils. Il prend en otage une population palestinienne qui paie un lourd tribut.
La France condamne avec force cette organisation terroriste qui utilise les souffrances et le ressentiment des populations palestiniennes en attente d’une terre, pour attiser la haine des valeurs et des civilisations occidentales.
Depuis, les attentats d’Arras et Bruxelles qui ont suivi, sont des tentatives d’exporter le conflit en Europe.
Rien ne serait pire que de confondre le Hamas avec la cause palestinienne et sa légitime revendication à disposer d’un État autonome. Le Hamas s’est assuré du pire pour qu’Israël ne puisse accepter le moindre accord.
C’est pour ne pas donner de nouveaux prétextes aux terroristes du Hamas et a leur soutien iranien qu’il est essentiel que la démocratie israélienne combatte en respectant le droit international humanitaire.
La récente provocation du ministre des Affaires étrangères iranien appelant à éradiquer les juifs et à rayer Israël de la carte est une nouvelle illustration du niveau de tension aujourd’hui atteint… Pendant ce temps, la Russie jubile et la Chine, banquier de l’attelage, observe avec attention le désordre et les conflits se multiplier…
Pour ces trois États : Iran, Russie ou Chine, le Hamas n’est pas une organisation terroriste.
Si Israël bombarde Gaza et élimine le Hamas, qui gérera Gaza en ruines ?
Comment éviter que toute la jeunesse palestinienne ne se rallie aux sirènes du Hamas suite à l’effondrement de l’autorité palestinienne en Cisjordanie ?
Comment ne pas craindre l’escalade régionale avec le Hezbollah, qui, non content d’étrangler le Liban, est susceptible de plonger à nouveau le Pays du cèdre dans un conflit avec son voisin ?
700 militaires français sont déployés dans le cadre de la Force intérimaire des Nations Unies au Liban, à la frontière avec Israël. Ils seraient en première ligne en cas d’une reprise des hostilités. Ne les oublions pas !
Le rapport de la commission des affaires étrangères du Sénat, intitulé « Israël-Palestine : redonner un horizon politique au processus de paix » avait anticipé, il y un an, l’embrasement que nous déplorons aujourd’hui.
La formation du gouvernement de M. Netanyahou qui allie la droite avec une extrême droite composée de suprémacistes juifs, tenants d’une idéologie expansionniste et visant un état théocratique soumis à la loi religieuse, menace les fondements de la démocratie israélienne.
Il pose un problème de morale et de conscience que les manifestations hebdomadaires dans l’Etat hébreu ont révélé.
« D’un côté, les provocations délibérées de ministres israéliens pressés de montrer aux Palestiniens de quel côté se situe la force, de l’autre la montée d’un désespoir mortifère devant la dégradation des conditions de vie en Cisjordanie et l’absence de toute perspective de paix dans la justice ont conduit à l’explosion actuelle ».
L’escalade de violences en territoire israélo-palestinien vient nous rappeler que la solution à deux États, un État d’Israël et un État Palestinien, est la seule solution viable pour la paix. Les accords d’Abraham ont permis des avancées majeures auprès des Pays du Golfe. Ils ont apporté une nouvelle dynamique de normalisation israélo-arabe.
En ne s’alignant pas sur les Etats-Unis en 2003 dans son intervention en Irak, la France a acquis une crédibilité au Moyen Orient. Elle demeure un tiers de confiance naturel pour amorcer un nouveau dialogue et un nouvel horizon au processus de paix.
Pour Israël, cela consistera à abandonner sa stratégie de colonisation en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. Pour la Palestine, cela signifie la fixation d’un calendrier démocratique avec des garanties de déroulement des scrutins en Cisjordanie, à Gaza et à Jérusalem-Est.
Lors des émeutes très violentes qui se sont déclarées après la mort d’un jeune homme de 17 ans à Nanterre, de nombreux équipements publics ont été incendiés ou saccagés : mairies, postes de police municipale, écoles, crèches ont été ciblés.
Plusieurs communes ont été particulièrement touchées, laissant les maires, les élus et les habitants abasourdis et parfois désespérés devant tant de violence et de gâchis.
Après une période de sidération puis de colère, est venu le temps de la reconstruction.
Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques du Sénat, sénatrice des Yvelines a déposé, avec d’autres collègues, dès lundi 3 juillet une proposition de loi qui entend, mettre en place des mesures dérogatoires exceptionnelles, permettant cette reconstruction dans les délais les plus brefs.
Inspirée par les dispositions exceptionnelles adoptées après l’incendie de Notre-Dame de Paris, cette proposition entend :
faciliter la réalisation, dans les meilleurs délais et dans des conditions de sécurité satisfaisantes, des opérations de travaux de restauration et de reconstruction des bâtiments publics endommagés ou détruits lors des émeutes du 27 juin et des jours suivants ainsi que les aménagements de leur environnement immédiat ;
adapter aux caractéristiques de ces opérations les règles applicables à ces travaux et aux opérations connexes, comprenant notamment la réalisation des aménagements, ouvrages et installations utiles aux travaux de restauration et de reconstruction ou à l’accueil du public pendant la durée des chantiers ainsi que les travaux et transports permettant l’approvisionnement de ces chantiers ;
raccourcir les délais de passation de marché liés à ses travaux ;
permettre qu’au delà des remboursements assurantiels, le reste à charge pour les communes puisse être subventionné totalement par l’État ou les collectivités territoriales qui souhaiteraient le soutenir.
En recevant les maires à l’Élysée, le Président de la République a apporté son soutien à cette proposition. Il est urgent de légiférer.
A Sombernon, j’ai participé à la table ronde de l’AG de la FDSEA pour débattre des préoccupations du monde agricole, avec Marc Fesneau, Ministre de l’Agriculture (en visite le matin dans le Parc National de Forêts avec Elisabeth Borne) et Arnaud Rousseau, Président de la FNSEA.
Au lendemain de la recommandation de réduction du cheptel bovin par la Cour des Comptes, le risque de « déclassement » de l’agriculture française interroge, d’autant plus que la perte de notre indépendance alimentaire s’accélère !
Excédés par autant d’incohérence politique et d’ignorance des réalités de leur profession, les agriculteurs ont profité de la présence du Ministre pour alerter sur des situations économiques et humaines qui ne sont plus tenables.
Le président de la FNSEA et les responsables locaux ont relayé les difficultés et les attentes exprimées sur le terrain.
Les éleveurs victimes de la tuberculose bovine réclament une revalorisation des indemnisations, tandis que ceux soumis à la prédation du loup attendent une révision du plan Loup pour mieux protéger leur cheptel. La question sur la place du loup dans le Parc National de Forêts n’est à ce stade pas éclaircie.
Les maraîchers ont fait valoir l’évolution de leurs besoins d’irrigation et la nécessité d’adapter les autorisations administratives en conséquence.
Les aides compensatoires liées aux handicaps géographiques pour les zones intermédiaires et les zones défavorisées simples (ICHN) ont aussi été évoquées.
Autant de sujets cruciaux qui appellent à soutenir la compétitivité de notre modèle de production agricole face aux enjeux climatiques (stockage de l’eau), énergétiques (biomasse…) et de souveraineté alimentaire.
Le 4 avril 2023, le Sénat a adopté la proposition de loi que j’ai déposé avec mes 3 collègues Jean Bacci, Pascal Martin et Olivier Rietmann.
Cette proposition s’ancre dans l’actualité et l’intensification du risque incendie de forêts, observée depuis plusieurs mois du fait des sécheresses à répétition et des fortes chaleurs que nous connaissons désormais.
Elle vise à mobiliser les acteurs et les moyens pour renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie.
Le texte préconise la définition d’une stratégie nationale déclinée par massif forestier, un renforcement des obligations légales de débroussaillement (OLD), des outils d’urbanisme pour permettre aux élus de mieux appréhender le risque.
Il déploie des outils de gestion durable des massifs forestiers à même de favoriser une plus grande résilience des espaces naturels.
Enfin, il incite à sensibiliser davantage les populations à une culture du risque et à adapter les moyens en hommes et en matériels des Services Départementaux d’Incendie et de Secours.
La proposition adoptée à l’unanimité au Sénat, est en cours d’examen par l’Assemblée nationale.
Mal amenée, par une loi de finance rectificative de la sécurité sociale plutôt qu’un projet de réforme !
Mal expliquée, sans débats sur les différentes options possibles, avec des informations qui se sont révélées inexactes au fil des échanges…
Mal conçue, car ne répartissant pas les efforts et se focalisant sur l’allongement de la durée du travail.
Au final, pas votée par le Parlement et adoptée par 49.3.
Un bilan qui laisse pantois s’agissant d’une loi qui doit impacter durablement tous les français!
Si je suis d’accord avec la nécessité de réformer le système des retraites pour l’adapter tant aux évolutions démographiques qu’à celles du marché de l’emploi, je ne partage pas ni la méthode ni l’option choisie par le gouvernement, à savoir faire peser l’avenir du financement du système de retraite, uniquement sur une mesure d’âge.
Certes, nos voisins travaillent plus longtemps que nous, mais ils n’ont pas les mêmes réalités démographiques et sont confrontés au défi du renouvellement des générations dans des proportions bien plus préoccupantes (taux de natalité en Allemagne : 1,5 ; en Italie : 1,2 ; quand la France est à 1,9).
D’autres options étaient possibles. Mais dès le départ, le gouvernement a fait le choix de balayer les alternatives complémentaires. Cette absence de dialogue en amont a fragilisé la réforme, ressentie comme déséquilibrée et injuste. Pour optimiser les recettes, il faut s’intéresser davantage à :
l’égalité salariale homme/femme,
l’emploi des seniors,
l’augmentation de la durée de travail hebdomadaire (35h) pour ceux qui le souhaitent,
introduire des contributions sur les transactions financières.
Autant de mesures évoquées, comme les sujets de pénibilité ou de retraite des femmes, mais insuffisamment prises en compte par le projet du gouvernement. Pourtant, elles représentent à elles seules plusieurs milliards de recettes !
Pour sortir de cette spirale de tensions et de violences, nous devons renouer avec les fondements de nos pratiques démocratiques : le débat et la recherche du consensus en donnant toute leur place aux corps intermédiaires.
L’avis du Conseil Constitutionnel mi-avril, constitue la prochaine étape dans le parcours chaotique de cette réforme qui, quoiqu’il arrive ne résoudra pas le problème de financement à long terme du système de retraite.
Mercredi 15 février 2023, le Sénat a examiné la proposition de loi visant à sécuriser l’approvisionnement des Français en produits de grande consommation.
Adoptée en procédure accélérée à l’Assemblée Nationale, la proposition de loi de Frédéric Descrozaille, avait pour objectif affiché de préserver la rentabilité des industriels français approvisionnant les distributeurs en produits de grande consommation, en équilibrant le rapport de forces économique. Elle prolonge certains dispositifs limités dans le temps ayant été introduits par les lois Egalim I et II.
Dans un contexte où les marges sont écrasées par la hausse des coûts de production (inflation, guerre en Ukraine, désordres internationaux…), les négociations commerciales continuent d’être marquées par un climat de grande tension et de déséquilibre structurel entre les parties.
En tant que rapporteure pour la commission des affaires économiques du Sénat, j’ai réaffirmé notre volonté d’établir un cadre législatif plus équilibré, prenant en compte les intérêts des agriculteurs, fournisseurs et distributeurs, comme des consommateurs.
L’enjeu est de taille pour préserver les agriculteurs et les entreprises de nos territoires à un moment où la souveraineté alimentaire devient un défi de société !
En ce sens, le Sénat a modifié le texte sur plusieurs points majeurs :
1/ S’assurer de l’efficacité du SRP+10 en matière de partage de la valeur.
Le Sénat a souhaité un débat de fond sur ce dispositif, singulier à la France et introduit par la Loi Egalim 1 en 2019.
En effet, l’expérimentation du relèvement de 10 % du seuil de revente à perte sur les produits alimentaires (« SRP+ 10 ») a maintenant 4 ans.
Les rapports révèlent qu’entre 600 et 800 M€ sont prélevés chaque année dans la poche du consommateur sans que l’on constate un « ruissellement » sur la rémunération des agriculteurs.
A ce jour, c’est donc un chèque en blanc de près de 2,8 milliards, versés à la grande distribution, sans contrepartie de partage de la valeur (« ruissellement ») sur les producteurs.
Tirant les conséquences de ce manque d’efficacité et de l’absence de transparence de la part des distributeurs, la commission des affaires économiques avait modifié le texte pour suspendre l’expérimentation, le temps que la période d’inflation sur les produits alimentaires (14%) s’apaise.
Face aux inquiétudes des acteurs qui craignent que cette suspension ne tende encore davantage les négociations commerciales, un nouvel amendement adopté en séance a prévu la prorogation jusqu’en 2025 de l’expérimentation SRP+10 (soit 7 années d’expérimentation !!) en l’assortissant désormais d’un rendu annuel des distributeurs au Ministre et aux présidents des commissions des affaires économiques du Senat et de l’Assemblée nationale, sur leurs usages du SRP+10.
Par ailleurs, cet amendement précise que les fruits et légumes frais sont désormais exclus de l’application du SRP+10, qui a été préjudiciable aux producteurs ces dernières années ; tout en laissant la possibilité au ministre, sollicité en ce sens par une demande d’une interprofession représentative, de faire entrer certains de ces produits dans le champ d’application du dispositif.
2/ Encadrer les « sur-promotions » sur les produits non-alimentaires, préjudiciables à la pérennité des entreprises et des emplois dans les territoires.
La loi Egalim 1 a eu un effet de bord dommageable pour les fabricants de produits DPH (droguerie-parfumerie-hygiène). En encadrant les promotions sur l’alimentaire, les promos « choc/ attractives » parfois jusqu’à 90%, se sont reportées sur le non-alimentaire.
Ces promotions sont financées par les fournisseurs (rarement les distributeurs) qui sont ainsi mis en grandes difficultés financières. De nombreuses PME françaises et des milliers d’emplois sur nos territoires sont en péril !
3/ Rééquilibrer la relation fournisseur/distributeur tout en préservant le principe fondamental de liberté contractuelle (article 3).
La rédaction adoptée en commission du Sénat précise qu’en cas d’échec des négociations au 1er mars, le préavis de rupture doit désormais tenir compte des conditions économiques du marché : c’est-à-dire, par exemple, de l’inflation du coût des intrants, du prix moyen accepté par les autres distributeurs concurrents…. Il s’agit de répondre à une triple inquiétude : celle des PME, qui ne risquent plus d’être déréférencées subitement, puisque le principe du préavis est maintenu ; celle des distributeurs, qui craignent de ne plus être livrés ; et celle des fournisseurs, qui ne sont plus obligés de livrer des produits à l’ancien tarif, c’est-à-dire à perte.
4/ Durcissement du régime des pénalités logistiques, compte tenu des abus qui continuent d’être constatés.
5/ Introduction d’un nouveau dispositif visant à mieux protéger les matières premières agricoles des produits vendus sous marque de distributeur (MDD).
Le texte étant examiné en procédure accélérée, ces différents points seront à nouveau débattus en commission mixte paritaire début mars.
Face aux bouleversements mondiaux, aux tensions énergétiques et à l’inflation qui a fait reculer de 7,5% en un an la consommation des ménages, de nombreuses interrogations traversent le monde agricole.
Les débats lancés dans la perspective de la prochaine Loi d’Orientation Agricole (PLOA) doivent permettre de partager sur les réalités de ce nouveau monde et les opportunités pour l’agriculture française.
L’Assemblée départementale des Jeunes Agriculteurs qui s’est tenue à Châtillon-sur-Seine sous la présidence de Baptiste Colson, a abordé ces nombreuses questions.
Les deux précédentes lois Egalim, destinées à mieux rémunérer les producteurs, font l’objet de contournements par certains industriels ou distributeurs. Ainsi une nouvelle Proposition de Loi, pour laquelle je suis rapporteure au Sénat, est actuellement en cours d’examen.
Pour autant, le cadre législatif ne règlera pas tous les problèmes, notamment s’agissant des productions qui ne sont pas contractualisées. Si nous nous comparons à nos voisins allemands, pourtant non soumis à la Loi Egalim, on observe des augmentations similaires ( + 3,5%), fondées sur un meilleur dialogue lors des négociations commerciales. En France, depuis les Lois Egalim, l’outil contractuel est devenu le PRINCIPAL ATOUT entre les mains des producteurs. Il « garantit » en effet que le prix de la matière première agricole ne sera pas négocié.
Pendant la pandémie, la France a été épargnée par les pénuries, mais depuis ces derniers mois l’insécurité alimentaire frappe 30% de la population mondiale. Revoir la stratégie européenne à l’aune de ces réalités nouvelles, relocaliser les productions, soutenir les filières animales, faciliter les dossiers d’accès à l’eau, accompagner les projets d’installation… sont autant d’enjeux pour assurer une plus grande souveraineté alimentaire du Pays et venir en soutien aux populations frappées ou menacées par des famines…